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MAUVAIS RÊVES ?

Guillaume Bression & Carlos Ayesta

 

 

Face à une menace imperceptible, le Japon a du choisir de séparer territoires, objets et lieux contaminés de ceux qui ne le seraient pas. Mais cette frontière semble plus floue et subjective. Chacun est amené à se fixer ses propres limites. Des limites qui finissent par diviser les gens eux-mêmes. En alternant mise en scène volontairement "irrationnelles" et constructions transparentes à l'intérieur même du paysage, ces photographies posent la question d'une contamination qui n'a pas de frontière claire et de la façon dont on serait tenté de réagir. Cette menace grise devient le terreau fertile de notre imagination et de nos peurs. Des peurs qui pourraient même devenir plus nocives que la radiation elle-même.

Pour la série "Mauvais Rêves", Carlos Ayesta et Guillaume Bression se sont rendus une nouvelle fois dans les territoires contaminés de la préfecture de Fukushima au Japon (Namie, Odaka, Date, Iitate, Kawamata) et ont réalisé ces photographies avec l'aide des résidents eux mêmes. A ce titre, nous souhaitons remercier Nakajima Takashi, Yoshinari Hirohagu, Tanji Kohdai, Shima Akemi, Ooyama Yoshihiko, Sato Kenji, Handa Shinji et Tsugyo Takahashi qui ont acceptés de poser dans ces photographies.

 

 

Propos recueillis dans le hors série N°19 d’Image magazine

par Sophie Bernard, rédactrice en chef .

 

 

Après une première série sur Fukushima intitulée “Clair obscur ” réalisée un an après la catastrophe, Guillaume Bression et Carlos Ayesta sont retournés au Japon. Un deuxième volet nommé “Mauvais rêves” propose une réflexion sur le mal invisible qui ronge autant l’environnement que le corps et le cœur des habitants de la région. Dans “Clair obscur”, l’intention première des deux photographes était de dresser un constat de la catastrophe en montrant les paysages dévastés. Les photographes y affirmaient également leur volonté de réaliser des images à l’esthétique forte. D’où le choix de faire les prises de vue de nuit. Avec “Mauvais rêves”, ils délaissent encore un peu plus le documentaire en ayant recours à la mise en scène. Guillaume Bression et Carlos Ayesta sont en effet partis à la rencontre des habitants et, après de longues discussions, ils sont parvenus à les convaincre de devenir les acteurs de leur propre histoire. La radiation ne se voit pas. Elle n’a pas d’odeur non plus. Alors où donc se situe la frontière entre ce qui est contaminé et ce qui ne l’est pas ? Dans les faits, il est difficile de répondre. Pourtant, des villes, des forêts ou encore l’océan sont divisés en différentes zones, les unes interdites, les autres pas… Pour montrer ces frontières, Guillaume Bression et Carlos Ayesta ont choisi le plastique transparent, sous la forme d’un film étirable encore d’une bulle. Précision utile : tous les objets présents dans les photos sont réels. Les photographes n’ont pas utilisé de logiciel de retouche. Etrangement, c’est par le recours à la fiction que Guillaume Bression et Carlos Ayesta parviennent à révéler ce qui est invisible. Et pour une fois, c’est la fiction qui conduit au réel et non l’inverse. Bienvenue dans ce monde à la fois beau et inquiétant.

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